Après une marche pacifique contre ces groupes armés qui font la loi dans la ville, le principal groupe extrémiste a été chassé de son QG.
Des centaines de manifestants se sont rebellés vendredi 21 septembre contre les milices armées qui font la loi dans Benghazi et ont réussi à déloger le groupe salafiste Ansar al-Charia de la caserne qu'il occupait au centre de la ville, selon les constatations d'un journaliste de l'AFP. Plus tôt, ils étaient des dizaines de milliers à protester contre l'omniprésence des miliciens, qui a cours depuis la mort de Kadhafi.
Ansar al-Charia avait été montré du doigt après l'attaque du consulat américain dans laquelle l'ambassadeur des Etats-Unis et trois membres de l'équipe diplomatique ont perdu la vie. Aux cris de "le sang des martyrs n'a pas été versé en vain", les manifestants sont entrés dans la caserne qui a été saccagée, pillée et incendiée. Selon des témoins, Ansar al-Charia a également évacué l'hôpital al-Jala qu'elle contrôlait, sous la pression des manifestants. Et la police militaire a pu prendre possession du bâtiment.
Les manifestants se sont ensuite dirigés vers le quartier général de la brigade de Raf Allah al-Sahati, un groupe islamiste sous l'autorité du ministère de la Défense. Des combats à l'arme lègère et aux roquettes ont alors opposé les deux camps durant deux heures, avant que la brigade ne décide de quitter les lieux. Au moins 4 personnes ont été tuées et 40 blessées lors de ces combats, selon un décompte basé sur les bilans de trois hôpitaux de la ville.
Les assaillants se sont ensuite attaqués à cette installation militaire située dans la région de Hawari, à 15 kilomètres du centre de Benghazi, s'emparant d'armes, de munitions et du matériel informatique. Plus tôt, des dizaines de milliers de Libyens avaient manifesté pacifiquement à Benghazi contre les milices armées. Au moins quatre autres installations publiques ont été désertées par des milices à l'arrivée des manifestants.
Les autorités libyennes ont aussitôt mis en garde contre le "chaos" et ont appelé les manifestants à faire la différence entre les brigades "illégitime" et celles qui sont sous l'autorité de l'Etat. Le président de l'Assemblée nationale, Mohamed al-Megaryef, s'est pour sa part félicité de la réaction de la population contre les "brigades en dehors de la légitimité", mais a appelé les manifestants à se retirer immédiatement des emplacements occupés par des brigades du ministère de la Défense, citant Raf Allah Sahati, la brigade du 17 février ou encore Le bouclier de la Libye. Le ministre de l'Intérieur, Fawzi Abdelali, met lui en cause des personnes "infiltrées entre les manifestants". Certains de ces "infiltrés" font partie des services de sécurité, selon lui, et veulent le "chaos et la sédition".
L'attaque contre le consulat américain, déclenchée lors d'une manifestation contre le film anti-islam "The Innocence of Muslims", a illustré l'incapacité des autorités à assurer la sécurité dans le pays ainsi que la montée en puissance de groupes islamistes radicaux en Libye. Le nouveau pouvoir a également échoué à désarmer et à dissoudre les groupes d'ex-rebelles ayant combattu le régime de Mouammar Kadhafi au cours de la révolution de 2011, même si plusieurs d'entre eux ont intégré les ministères de la Défense et de l'Intérieur.
Benghazi, deuxième ville de Libye, d'où était partie en 2011 la contestation qui a renversé le régime de Kadhafi, a été le théâtre ces derniers mois de plusieurs autres attaques contre des intérêts occidentaux ainsi que d'assassinats de responsables de la sécurité.
Nouvel Obs.