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16 novembre 2012 5 16 /11 /novembre /2012 18:30

En quelques jours à peine, la nouvelle coalition nationale syrienne est passée du statut de mauvais élève dans la résolution du conflit syrien à celui d’enfant prodigue, accueilli par la France qui lui offre même des armes en cadeaux de retour « à la raison ». N’est-ce pas un peu trop d’empressement pour une force d’opposition qui n’a, finalement, que très peu d’espérance de vie ?

coalition-nationale-syrie.jpgÀ peine intronisée, la nouvelle « coalition nationale des forces de la révolution et de l’opposition syrienne » n’a pas fait ses preuves, mais peut déjà se vanter d’avoir obtenu le soutien inconditionnel de la France. Inconditionnel, le mot est faible au regard des nombreuses déclarations et promesses qui ont été faites depuis le dernier jour du Sommet de Doha, dimanche 11 novembre, il y a donc à peine quatre jours.

L’empressement de la France pour la reconnaissance

Rembobinons tous les évènements de cette semaine. Par la voix de son ministre des Affaires étrangères, la France a tout d’abord apporté « son plein soutien » à cette coalition censée regrouper les multiples forces d’opposition syrienne et parvenir à court terme, à la formation d’un gouvernement provisoire. « Cet accord constitue une étape majeure dans le processus indispensable d’unification de l’opposition syrienne. La France lui apporte son plein soutien, afin que cette coalition puisse constituer une alternative crédible au régime de Bachar al-Assad », a ainsi affirmé Laurent Fabius dans une déclaration, lundi 12 novembre. Le lendemain, à l’occasion de sa conférence de presse, le président François Hollande allait plus loin et affirmait : « J’annonce que la France reconnaît la coalition nationale syrienne comme la seule représentante du peuple syrien et donc comme le futur gouvernement provisoire de la Syrie démocratique permettant d’en terminer avec le régime de Bachar al-Assad. »

Après la reconnaissance, les armes

Répondant à un appel pressant du chrétien Georges Sabra qui, à l’occasion de la signature de la charte de la coalition déclarait à l’adresse de la communauté internationale : « Nous n’avons pas seulement besoin d’argent et de pain, nous avons besoin d’armes pour nous défendre », François Hollande s’est empressé d’affirmer que la question de la livraison d’armes serait « nécessairement reposée ». « Pas simplement à la France, mais à tous les pays qui reconnaîtront ce gouvernement provisoire », a-t-il ajouté. L’histoire n’est pas encore terminée. Jeudi 15 novembre, quatre jours après la création de la coalition nationale, Laurent Fabius annonce que la France va faire une demande à l’Union européenne pour permettre la levée de l’embargo sur les « armes défensives » car « la coalition nous l’a demandé ». Mission accomplie le jour même. Finalement, et la boucle est pour le moment bouclée, François Hollande s’apprête à recevoir les dignes représentants de cette coalition à l’Élysée, samedi 17 novembre.

L’opposition tant attendue ?

En une semaine, l’opposition au régime de Bachar al-Assad, bien incapable de se réunir depuis vingt mois de conflit, est passée du stade d’agglomérat de personnalités et d’intérêts particuliers à un groupe tellement solide qu’on pourrait lire le tendre avenir de la Syrie dans leurs yeux. Bachar al-Assad n’a qu’à bien se tenir, l’opposition est en place, l’Union européenne lui donne des armes, un gouvernement provisoire va bientôt être nommé et il parviendra bien entendu à renverser le régime, dans les délais les plus brefs. Oui mais. Car il y a un « mais ». Sur la place publique, si la voix de la France se fait pressante, ailleurs, la mesure est de rigueur. Et ce, pour plusieurs raisons.

Un simple « groupe représentatif »

Si, au lendemain de la création de la coalition, les États-Unis ont voulu se montrer encourageants, félicitant cette avancée dans le cours de la résolution du conflit, ces derniers se sont rattrapés à peine quelques jours après. Ainsi, Barack Obama a-t-il affirmé qu’il n’était pas prêt à reconnaître l’opposition syrienne en tant que gouvernement en exil mais comme un simple groupe représentatif.

 

« Un groupe représentatif ». C’est justement ce que ne voulait absolument pas devenir cette « coalition nationale », et c’est surtout le résultat parfaitement inverse de la mission qui avait été confiée à l’opposition alors que ses divers membres devaient se réunir à Doha. La communauté internationale réclame à l’opposition un gouvernement provisoire depuis maintenant des mois, et au lieu de cela, l’opposition qui a fait tant d’efforts pour se parler calmement se trouve reléguée au simple rang de « groupe représentatif ».

Une précipitation à la française

Quant aux deux personnes les plus investies dans le conflit, Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU, et Lakhdar Brahimi, émissaire international des Nations unies pour la Syrie, ils se sont bien gardés de s’exprimer. Sans doute pour laisser le temps au temps, ces deux initiés de la diplomatie ont conscience que, lorsqu’il s’agit de Syrie, attendre un retournement de situation est préférable à la précipitation. Et dans ce cas-ci, il y a flagrant délit de précipitation. Mais pourquoi tant d’affolement pour livrer des armes aux rebelles au nom d’une coalition qui n’a pas encore fait ses preuves ? C’est à croire que les problèmes fondamentaux qu’ont rencontrés les membres de l’opposition syrienne ont disparu en quelques jours.

 

Pourtant, il s’agit bien des mêmes personnalités, des mêmes ambitions, des mêmes groupes d’intérêts. L’opposition syrienne est une sorte de jeu des 7 familles dans lequel cherchent à cohabiter, contre tout bon sens pour la plupart, opposants de l’intérieur et opposants de l’extérieur, sunnites, alaouites (il y en a certes peu) et chrétiens (assez peu également), islamistes et musulmans modérés. Tant d’intérêts qui arrivent à survivre ensemble de l’autre côté de la frontière, au Liban, mais qui n’arrivent pas à joindre leur voix depuis le début du conflit en Syrie.

Qu’en est-il de l’Armée syrienne libre ?

Et s’ils sont nombreux à avoir signé la charte fondatrice de cette « opposition nationale », il manque toujours certains éléments du jeu. L’Armée syrienne libre, composée de Syriens de Syrie, se battant depuis les premiers jours du conflit, n’a jamais accepté l’autorité du Conseil national syrien (CNS), composé, lui, de Frères musulmans vivants pour la plupart entre Londres, Ankara, Riyad… Bref, partout où les bombes ne tombent pas. Ce n’est sans doute pas encore aujourd’hui que l’Armée syrienne libre va accepter de satisfaire aux exigeantes volontés de cette « coalition nationale » tout droit sortie de luxueux bureaux de Doha, quand eux, les soldats, se cachent de l’armée à Alep.

Aucune négociation avec le régime

En s’attardant un peu sur cette charte fondatrice, on tombe d’ailleurs sur l’article 3. « La coalition s’engage à n’engager ni dialogue ni négociation avec le régime. » Alors que Ban Ki-moon s’évertue depuis de nombreux mois à tenter une sortie « à l’amiable » de Bachar al-Assad, il est peu probable qu’un article de ce genre recueille son approbation.

 

Quant à l’appel aux armes lancé par George Sabra et auquel s’est empressé de répondre François Hollande, il ne doit sans doute pas être le bienvenu auprès de Lakhdar Brahimi, qui, lorsqu’il était reçu à l’Élysée en septembre dernier, demandait au président français d’intervenir auprès de ses alliés du Golfe pour qu’ils cessent les livraisons d’armes vers la Syrie. Bref, contre toute attente de la diplomatie française, cette coalition a une espérance de vie bien limitée. Et la cérémonie élyséenne et en grande pompe qui devra adouber l’opposition syrienne, samedi 17 novembre, aura sans doute des airs de 10 mars 2011, lorsque Nicolas Sarkozy recevait, sans aucune légitimité, le Conseil national de transition libyen.

 

Ecrit par Sybille De Larocque

http://www.jolpress.com

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