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24 août 2008 7 24 /08 /août /2008 11:34
 
 Father of Barack Obama, Barack Hussein Obama Senior, of Nyangoma-Kogelo, Siaya District, Kenya (left) and Ann Dunham with her two-year-old son Barack Obama  Barack Obama et sa grand-mère, Sarah Hussein Obama

 

Dans la course à l'investiture démocrate, le sénateur noir a le vent en poupe. Pour beaucoup, il incarne l'image d'un renouveau porteur d'espérance, pour une nouvelle ère politique. D'où vient cette ferveur? Pourquoi tant d'Américains sont-ils séduits par son charisme? Décryptage d'une irrésistible ascension.

Ils auraient presque pu se passer de l'accompagnement à la guitare. La brochette de chanteurs et d'acteurs n'avait qu'à se laisser porter par la voix du leader. Leur clip en noir et blanc a été vu par des millions et des millions de personnes sur Internet. Grâce aux présences de Will.I.Am, le chanteur de Black Eyed Peas, ou de la belle Scarlett Johansson? Pas si sûr. Plutôt la beauté du message, et la justesse de la déclamation. Il y est question du «murmure des esclaves» et des «chants des immigrants», de la jungle impitoyable qu'est la vie, et du chemin en direction de la Terre promise. Le chant veut apporter la justice et l'égalité. Il veut guérir le pays et réparer le monde. Il est signé Barack Obama, cet homme dont l'Amérique a découvert qu'il est une bête de scène, et accessoirement, le candidat le mieux placé dans la course à la Maison-Blanche.

Avant même sa mise en musique, le «Yes we can» était un tube. Et pour cause: c'était l'un des meilleurs discours jamais prononcés par le jeune prodige. Ou l'un des pires, c'est selon. Il reste en tout cas comme l'un des plus emblématiques, celui peut-être qui aura fini de transformer Obama en «phénomène».

Le sénateur venait de perdre l'élection du New Hampshire, le 8janvier. Mais on ne voyait que lui. Là où il aurait pu se contenter d'un discours de circonstance, il saisissait l'occasion pour enflammer les cohortes toujours grandissantes de ses fans. Une grande partie de la campagne américaine tourne aujourd'hui autour de son seul charisme, autour de ce que dégage sa personne. Mais il ne dit pratiquement jamais «je». «Yes we can», oui, nous le pouvons: le lendemain, sans le consulter (disent-elles) 40 personnalités se réunissaient pour entonner ses paroles à l'unisson dans un studio de Hollywood. Les images de Martin Luther King, dont il était initialement prévu qu'elles accompagneraient le clip n'ont pas été nécessaires. Le message d'Obama se suffit à lui-même.

L'Obamamania. Un mouvement? Un état d'esprit? Une secte? Après y avoir totalement succombé, les Etats-Unis s'interrogent aujourd'hui sur la signification de cette passion pour celui qui est arrivé comme un OVNI dans le paysage politique. Des sites internet, cette agora qui donne sa vraie profondeur à la campagne américaine, se sont amusés à décrire le candidat en «messie». Ses discours ne sont-ils pas truffés de références à l'espérance et à la promesse en des temps meilleurs? Ne demande-t-il pas aux électeurs, à tout bout de champ, de continuer à «croire»? Récemment, le républicain John McCain s'énervait: «Moi, je ne brigue pas la présidence avec l'idée d'avoir reçu du ciel une telle grandeur personnelle. Je ne crois pas que l'Histoire m'a choisi pour sauver notre pays dans un moment difficile.»

Ces critiques laissent de marbre les adeptes, qui n'ont que le mot «inspiration» à la bouche, lorsqu'ils sortent de l'un de ses meetings. Oprah Winfrey, la papesse des talk-shows, citait la Bible pour expliquer son soutien à Obama: «Un homme qui aime le pardon et rend la justice.» Le parlementaire John Lewis, vieux défenseur des droits civiques, parlait d'un «esprit» qui a fondu sur les Etats-Unis, à l'heure d'expliquer pourquoi il lâchait les Clinton pour se ranger derrière Obama: «Quelque chose est en train d'arriver en Amérique. Les gens sont prêts à faire le grand saut», justifiait-il.

Déjà 20 millions de votants. Un engouement sans précédent depuis des décennies. Au-delà de l'emballement médiatique, Barack Obama semble avoir touché quelque chose de très profond dans le cœur des Etats-Unis, ce pays si prompt à s'enticher de personnalités et à les transformer en étoiles. Bien sûr, on pense à Martin Luther King et à John F. Kennedy, deux précédents qui servent souvent de référence au jeune candidat. Le premier avait un rêve, le second incarnait à merveille une époque. Obama joue avec les mêmes ressorts, scandant ses rêves comme un révérend le ferait dans une Eglise noire, imposant l'image du renouveau par sa fraîcheur, son intelligence, son éloquence et son physique avantageux.

Mais à ces antécédents historiques, Obama ajoute d'autres caractéristiques. Père kényan, mère du Kansas, né à Honolulu il a grandi en Indonésie: Obama n'a pas mis les pieds aux Etats-Unis avant d'avoir 19 ans. Il vient de partout et de nulle part. Noir, il n'a pourtant pas été marqué par les luttes contre la ségrégation, ce coin enfoncé dans les relations entre les races aux Etats-Unis. Jeune, il ne fait pas partie de la génération des «baby-boomers». La guerre du Vietnam, les droits civiques, la révolution sexuelle, le rôle du gouvernement: autant d'enjeux nés dans les années 60 qui, dit-il, forgent encore à tort les catégories politiques utilisées actuellement. «Mon instinct me dit que la génération actuelle est plus intéressée dans un gouvernement intelligent, disait-il dans une interview. Si nous sommes face à un problème et que la solution du marché fonctionne, allons-y avec cette solution. Si la solution requiert une intervention de l'Etat, allons-y avec ça. Mais regardons quels sont les résultats pratiques. Je pense que c'est de ce genre de politiques dont le pays a faim maintenant.»

«Obama a sacrément raison», commente à ce propos l'écrivaine californienne Deborah White, qui se décrit elle-même comme une «baby-boomer libérale» (soit de gauche, dans le sens américain du terme): «A part dans notre génération, l'électorat américain est profondément fatigué de voir se rejouer les querelles de dortoirs d'université entre les hippies et les enfants de riches. Et cela inclut les rivalités entre Bush et Clinton, entre Bush et Kerry, et tout le brouhaha de ces dernières dernières années.»

Dans tous les coins du pays, le message de Barack Obama a soulevé une ferveur complètement inattendue auprès des jeunes Américains. Partout, il a réuni des milliers de volontaires chez ceux qui votent cette année pour la première fois de leur vie. Les dizaines de millions de dollars de donations qui emplissent les coffres de sa campagne sont souvent constitués de petites tranches, de 10 ou 20 dollars, obtenues par le travail de porte-à-porte de ces volontaires qui, jusqu'ici, n'ont pas connu d'autre président que les Bush (père et fils) et les Clinton (Bill).

Voilà longtemps, en réalité, que les sociologues prédisaient le grand réveil de «la génération X», que l'on disait à tort désintéressée du bien commun. Le détonateur? La guerre d'Irak, sans aucun doute. Pour les jeunes, elle n'a fait que renforcer le sentiment que Washington est un territoire opaque, où règnent les calculs, le mensonge et l'hypocrisie. A la fois vedette rock et sorte de grand frère, Obama ne fait pas partie de cette espèce. Aujourd'hui, ils s'y reconnaissent à plein.

Mais il n'y a pas que les jeunes. Obama, le premier, craignait d'être mis dans le rôle du «candidat noir» qui ne viserait qu'à reconquérir l'orgueil perdu d'une race. Il est sorti de cette case, transformant chacun de ses handicaps en vertus: son inexpérience, sa prétendue naïveté, son idéalisme. Comme sénateur, il a voté plutôt avec la gauche de son parti. Mais c'est sur ses années d'animateur social dans les rues de Chicago qu'il insiste constamment. Obama ne fait de la politique que pour la transcender. Il se trouve par ailleurs qu'il est Noir. Mais il se veut affranchi de toute limitation. Il veut changer de cadre, et en vient même à citer Ronald Reagan, ce cow-boy honni par les démocrates qui, à ses yeux, a chamboulé les repères de la droite américaine.

L'homme peine pourtant à convaincre les plus sceptiques, d'autant plus qu'une certaine lassitude se laisse déjà entrevoir après plus d'un an de campagne. Il a converti «l'espoir» en thème central des élections. Mais l'espoir de quoi? Le changement, il l'utilise à toutes les sauces. Mais le changement vers quoi? Obama a répété des milliers de fois ces concepts flous, au risque de les vider entièrement de leur charge émotionnelle. A ceux qui lui reprochent de s'en tenir à des mots, il rétorque pourtant (en empruntant d'ailleurs cette réponse à l'un de ses vieux amis gouverneurs, ce qui lui vaut le reproche de plagiat): «Et la déclaration des droits de l'homme? Et le fait que nous naissions tous égaux en droits? Et le rêve de Martin Luther King? Juste des mots? Ne me dites pas que les mots ne comptent pas.»

Aujourd'hui, Obama le sait bien: il n'est pas temps d'aller au-delà et de se mettre à dos une partie de l'électorat en remplissant les cases qu'il a laissées vides à dessein jusqu'ici. Pour le moment, il s'agit plutôt d'atteindre ceux qui n'ont pas encore été exposés au virus de l'Obamamania, comme les Mexicains du Texas par exemple, dont l'équipe du candidat est persuadée qu'ils tomberont eux aussi sous le charme dès qu'ils le connaîtront mieux.

Mais ce refus d'entrer dans le détail n'est pas seulement affaire de tactique politicienne. Comme l'écrit l'excellent analyste George Packer dans le New Yorker, «Obama s'offre avant tout comme un catalyseur pour permettre aux Américains désenchantés de stimuler notre démocratie et de restaurer la foi en notre gouvernement.» «Bring the people together», «mettre ensemble les gens»: c'est la formule incantatoire du jeune sénateur qui entend mettre fin aux clivages politiques et réunir des alliances vastes, quitte s'il le faut à faire un bout de chemin avec les républicains. C'est ici que se trouverait la principale différence entre Barack Obama et sa rivale Hillary Clinton: la sénatrice de New York compte sur son expérience pour sortir le véhicule Amérique du caniveau dans lequel va le laisser George Bush. «Obama pense au contraire que la tâche du président consiste à persuader assez de gens de sortir de leur voiture et de l'aider à pousser.»

 



 

 

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